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éclairage pluridisciplinaire sur l'aménagement des langues créoles, langues en situation de contact inégalitaire
Patrick Nurbel
- Arcc
- 1 Juillet 2013
- 3760183302359
Les langues créoles sont toujours en contact inégalitaire avec des langues aménagées depuis longtemps. L'une des causes de l'inégalité dans ce contact de langues - mais chacun sait que ce n'est pas la seule, loin s'en faut ! - est justement le manque d'aménagement des créoles.
Or « Rien n'est facile en matière d'aménagement des langues et les sociétés créoles présentent à cet égard une situation particulièrement complexe. Peut-être même seraient-elles plus rétives que d'autres à la standardisation linguistique du fait de la présence dans leur intimité d'une langue standard qui est aussi une langue mère. » (Lambert Félix Prudent, Onzième Colloque International des Etudes Créoles).
Le colloque « Eclairages pluridisciplinaires pour l'aménagement des langues créoles, langues en situation de contact inégalitaire » avait pour but de répondre à la question suivante : Comment aménager les langues créoles dans ce contact inégalitaire, malgré ce contact inégalitaire ? Il y a largement réussi.
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Le syndicalisme dans les îles du sud-ouest de l'océan indien
Patrick Nurbel
- Arcc
- 1 Juillet 2013
- 3760183302366
Le 3 mars 1912, le monde ouvrier saint-paulois se réveille pour faire respecter son droit au travail. A partir de cette date rien n'est plus comme avant, car les travailleurs comprennent que l'union fait la force. Les syndicats de l'industrie sucrière apparaissent puis ceux du monde agricole et du monde des employés du public et du privé.
Pour fêter le centenaire du mouvement syndical réunionnais, l'Association Historique Internationale de l'Océan Indien et le Centre de Recherches Sur les Sociétés de l'Océan Indien ont décidé de consacrer les deux premières journées de la Semaine de l'Histoire 2012 à l'étude de l'évolution du syndicalisme dans le sud-ouest de l'océan indien depuis le XXe siècle. L'objectif est de mener une réflexion comparée sur les expériences syndicales dans les pays de cette zone et de donner la parole aux principaux acteurs.
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Avec les élections sénatoriales, l'année 2011 est une année décisive, puisqu'elle précède les élections présidentielles de 2012 qui représentent toujours dans la vie d'une Nation un moment majeur. Du choix des électeurs dépendent l'organisation et l'évolution de toute la vie économique, sociale, culturelle. Ce n'est pas rien. La méthode des primaires inaugurée par les socialistes pour désigner leur candidat puise ses racines aux Etats-Unis prouve à elle seule que rien ne peut plus être comme avant. Il n'en reste pas moins vrai que si les gouvernants une fois élus ont le pouvoir, au moment de passer dans l'urne l'électeur est souverain. Faire le point sur les pratiques et les méthodes employées par la classe politique depuis la Troisième République pour remporter les élections à la veille de cette échéance décisive en France afin de mesurer le chemin parcouru est une oeuvre saine. Mais personne ne doit oublier à La Réunion que la souveraineté citoyenne passe par la souveraineté alimentaire.
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L'octroi de mer à la réunion : une survivance fiscale et un impôt presque parfait
Rene Squarzoni
- Arcc
- 1 Mars 2011
- 3760183301840
Véritable tour de force que celui réussi par René Squarzoni : il arrive à passionner l'auditoire en parlant de l'octroi de mer !
Economiste de formation, l'universitaire bien connu à La Réunion s'intéresse notamment aux mécanismes qui assurent l'évolution rapide de la société réunionnaise dans les dimensions démographiques, économiques et sociales. D'où son approche plurielle sur l'octroi de mer, « un impôt assez central dans l'équilibre de la région ».
Qualifié de « dinosaure », l'octroi de mer s'est éteint dans les colonies ayant accédé à l'indépendance, et a survécu dans les quatre DOM, « dans un milieu qui s'est recomposé et a changé lui-même considérablement de substance et de portée. D'où un processus d'indigénisation puis d'endémisation ».
Cet impôt ancien a trois fonctions. Comme tout droit de douane il peut être un obstacle à l'entrée des produits et donc avoir un effet protecteur des productions locales, principalement des productions industrielles. C'est aussi un impôt qui rapporte : la recette a un impact sur les importateurs et les consommateurs. Troisième atout, le produit de cet impôt ne va pas se noyer dans le budget de l'Etat. Il est réservé - en tout cas à l'origine - aux communes réunionnaises entre lesquelles il est partagé et il a un impact sur les finances des collectivités locales.
René Squarzoni offre un percutant éclairage sur ce « mode de financement relativement discret et performant pour les communes réunionnaises. L'octroi de mer est un droit de douane : les taxes majorent le prix de revient de l'importateur qui va se rembourser en répercutant cette taxe sur le consommateur. Il pèse sur le pouvoir d'achat des Réunionnais ». En contrepartie la Réunion bénéficie d'une division par deux de la TVA appliquée par l'Etat sur la circulation des produits à l'intérieur de la Réunion.
Une conférence à découvrir pour cerner les aspects historiques, économiques et sociaux de ce fameux octroi de mer incitant René Squarzoni à la confidence suivante : « Un impôt presque parfait qui me plait beaucoup ; il a beaucoup plus de qualités que de défauts ».
Albert Weber René Squarzoni est Professeur en Sciences de l'Education à l'Université de La Réunion Il préside le Conseil Scientifique du Parc National des Hauts.
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Musicalité et créolité chez le poète Auguste Lacaussade
Patrick Nurbel
- Arcc
- 15 Février 2013
- 3760183302267
La musique c'est l'art des sons. Hegel dans L'Esthétique confère à la musique encore plus qu'à la peinture, le statut d'art romantique par excellence.
Auguste Lacaussade a été séduit dans sa jeunesse par la voix des vieux esclaves, par le son du tambour et du bobre africains. Si ce poète de l'exil désire être inhumé dans son île, c'est pour continuer à écouter le son de ce dernier instrument. Sa poésie est remplie de son île, qui le porte naturellement à la transcendance, mais surtout de la musique de son île. Le bruit des vagues, les cris des oiseaux donnent une vraie tonalité à ses poèmes. Il coule sa matière insulaire dans un moule sonore. Poèmes et Paysages portent ainsi la trace - audible - d'un rythme empreint au coeur de l'île, qui sourd des poèmes, de tous les poèmes. Le chant lacaussadien, né d'une impression sonore indélébile, indissociable de l'image de Bourbon, témoigne d'un sens métronomique marqué, d'un mode rythmique principalement binaire, d'un tempo lent, à valeur incantatoire.
Ces DVD reproduisent les travaux de trois journées de réflexion menées à l'université de Nice et à Aiglun sur l'importance de la musicalité chez Auguste Lacaussade.
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L'Outre-Mer au Salon du livre de Paris 2012 ; éditeurs et auteurs de l’océan Indien
Patrick Nurbel
- Arcc
- 15 Février 2013
- 3760183302342
De tous temps, la littérature des îles de l'océan Indien a retenu l'attention de lecteurs en quête de personnages et de paysages, d'histoires et d'accents différents. Voire exotiques au sens fort du terme.
Mais le temps de l'exotisme bon marché avec ses incontournables stéréotypes d'îles paradisiaques est (heureusement) bel et bien révolu pour céder la place à une littérature adulte, authentique, reflet de réalités socio-économiques contemporaines. Et aussi de problématiques et d'interrogations de portée universelles bien qu'enracinées dans l'inspiration d'ouvrages signés d'auteurs réunionnais, mauriciens, mahorais, etc.
Le document audio-visuel réalisé par Patrick Nurbel au Salon du Livre en mars 2012 met en évidence une éclatante diversité tant sur le fond que la forme : roman, poésie, nouvelle, conte, document historique, dictionnaire, etc.
Que ce soit en créole et/ou en français, la littérature des îles de l'océan Indien a pris depuis plusieurs années un salutaire envol assurément des plus significatifs. Qu'ils soient publiés sur leurs îles natales ou à Paris, les ouvrages mettent en relief une évidente authenticité aussi bien dans le domaine de la fiction de la réalité.
Ici, face à la caméra du directeur de l'Association réunionnaise culture et communication, place à des entretiens-vérités qui jaillissent avec le besoin de dire sans mentir, de raconter sans déformer. Et - faut-il le rappeler ? - toujours et encore cet infatigable besoin d'affirmer haut et fort des identités aux allures de destins assumés ou subis entre patrimoine et avenir, entre témoignages et imaginaire. Un document à découvrir pour mieux comprendre - et mieux aimer - le livre de De tous temps, la littérature des îles de l'océan Indien a retenu l'attention de lecteurs en quête de personnages et de paysages, d'histoires et d'accents différents. Voire exotiques au sens fort du terme.
Mais le temps de l'exotisme bon marché avec ses incontournables stéréotypes d'îles paradisiaques est (heureusement) bel et bien révolu pour céder la place à une littérature adulte, authentique, reflet de réalités socio-économiques contemporaines. Et aussi de problématiques et d'interrogations de portée universelles bien qu'enracinées dans l'inspiration d'ouvrages signés d'auteurs réunionnais, mauriciens, mahorais, etc.
Le document audio-visuel réalisé par Patrick Nurbel au Salon du Livre en mars 2012 met en évidence une éclatante diversité tant sur le fond que la forme : roman, poésie, nouvelle, conte, document historique, dictionnaire, etc.
Que ce soit en créole et/ou en français, la littérature des îles de l'océan Indien a pris depuis plusieurs années un salutaire envol assurément des plus significatifs. Qu'ils soient publiés sur leurs îles natales ou à Paris, les ouvrages mettent en relief une évidente authenticité aussi bien dans le domaine de la fiction de la réalité.
Ici, face à la caméra du directeur de l'Association réunionnaise culture et communication, place à des entretiens-vérités qui jaillissent avec le besoin de dire sans mentir, de raconter sans déformer. Et - faut-il le rappeler ? - toujours et encore cet infatigable besoin d'affirmer haut et fort des identités aux allures de destins assumés ou subis entre patrimoine et avenir, entre témoignages et imaginaire. Un document à découvrir pour mieux comprendre - et mieux aimer - le livre de l'océan Indien.
Albert Weber
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Créolie, créolité et interculturelle ; conférence Issa Asgarally
Patrick Nurbel
- Arcc
- 15 Février 2013
- 3760183302281
Pour l'auteur «créolité», à la mauricienne, semble assez restrictive, car «créole» est limité aux Mauriciens originaires de l'Afrique, ceux qu'on appelle la «population générale». Du coup, le Festival de la Créolité, qui est organisé chaque année à Maurice, est perçu comme le festival des Créoles par les Créoles et pour les Créoles. Nous sommes au coeur du multiculturalisme mauricien: à chaque «communauté ou «ethnie», ses festivals, son centre culturel, sa religion, son chef religieux et ses représentants politiques.
Par contre, la «créolie», qui a pris naissance à la Réunion, est plus intéressante puisque «créole» est utilisé au sens étymologique du terme, c'est-à-dire tout habitant né dans une île, ce qui fait que les Réunionnais d'origine africaine, chinoise, indienne ou européenne sont des Créoles. La créolie, dans la mesure où elle est d'origine poétique et promue d'ailleurs par Gilbert Aubry, -- poète qui se trouve être Evêque de la Réunion! -- est donc plus proche de l'interculturel tel que je l'ai développé dans mon essai «L'interculturel ou la guerre» (2005) et dans mon dernier livre «Comme un roman sans fin & autres textes» (2012).
Dans son intervention, Issa Asgarally revient sur l'interculturel, à la fois notion et pratique, qui prend de l'essor comme le prouve la tenue de deux colloques internationaux: le premier, organisé à Maurice en décembre 2012, par la Fondation pour l'Interculturel et la Paix (FIP) -- qu'il a créée en 2009 avec JMG Le Clézio -- et l'Institut Mahatma Gandhi; le second, celui de Cerisy, en septembre 2013. Il souligne le fait que la créolité n'est pas l'interculturel, ou pas encore, et que la créolie devrait dépasser le cadre des îles pour s'élargir au monde.
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Les indien de La Réunion, une diaspora en construction...
Patrick Nurbel
- Arcc
- 15 Mai 2012
- 3760183302205
Les différentes communautés indiennes constituent environ un tiers de la population réunionnaise. Largement ignorées par les pouvoirs publics français comme indiens, elles n'en sont pas moins à la recherche de leurs origines et d'une reconnaissance liée aux régions et au pays de leurs ancêtres. Malgré des résultats pour l'instant mitigés, elles persévèrent dans leurs tentatives de prendre langue, au propre comme au figuré, en Inde. Les différences entre les groupes rendent ce processus et leur célébration par New Delhi dans le cadre des manifestations autour de la diaspora difficiles. En effet, les Zarabes/Indo-musulmans constituent déjà une diaspora, n'ont que peu de contacts avec les Tamouls-Malbars, et entretiennent déjà des liens organiques avec l'Inde et avec la diaspora globale. Du coté des Tamouls-Malbars, la quête identitaire, la recherche de racines, et les réinventions culturelles et religieuses pour se mettre au diaspason de l'Inde s'accompagnent d'une tentative d'affiliation à un réseau diasporique global (GOPIO). Dans ce contexte, marqué par différentes vagues migratoires, différentes appartenances religieuses et linguistiques et par un fonctionnement républicain hostile à la notion de communautés, comment faire diaspora?
Ingrid Therwath est politologue et spécialiste de la diaspora indienne et de ses rapports avec l'Inde. Titulaire d'un doctorat de l'Institut d'études politiques (Paris) effectuée sous la direction de Christophe Jaffrelot, elle travaille sur les différentes formes de mobilisation politique à distance chez les migrants et leurs descendants, et en particulier sur le nationalisme et le régionalisme à distance. Après avoir passé 6 ans comme journaliste responsable de l'Asie du sud à Courrier International et avoir enseigné à Sciences Po, elle est depuis 2009, chercheuse au Centre de Sciences Humaines de New Delhi, où elle dirige l'axe Relations Internationales.
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Suzanne Thérèse Maillot : de l’or dans les doigts ; une vie au service de la broderie de Cilaos
Patrick Nurbel
- Arcc
- 6 Novembre 2013
- 3760183302298
Le cirque de Cilaos est d'abord décrit dans son hostilité géographique : hauts reliefs, inaccessibilité, rareté des terres cultivables; puis dans sa caractéristique historique comme lieu de refuge et de résistance des Marrons malgaches autrefois, des Blancs pauvres au XIXe . Presque un isolat, un lieu que l'on n'abandonne pas dit la tradition, peuplé de 70 familles en 1848, dont 89% n'avaient aucun esclave, vivant d'un peu de café, de polyculture (lentilles, pois, haricots, maïs) et de petit élevage. Comme une terre de liberté mais aussi de pauvreté, limitée dans son développement par l'interdiction de déboiser pour ne pas compromettre l'approvisionnement en eau des terres sucrières du Sud.
Un autre cirque naquit de la sériciculture lorsque Mac Auliffe introduisit le mûrier et sa fille Angèle la technique des travaux d'aiguilles, au début du XXe . A l'économie ancienne s'ajouta alors la broderie, les «jours de Cilaos», produits par les femmes, procurant un appréciable revenu complémentaire. Suzanne Maillot, née en 1946, 10ème enfant d'une famille de Cilaos, a baigné dès l'âge de 9 ans, dans un monde où la terre appartenait aux hommes et l'atelier de broderie aux femmes, se transmettant tous les secrets du métier de mère en fille. De quoi s'acheter des chaussures, du rhum, du riz blanc (un luxe pour remplacer à Noël ou à Pâques le maïs quotidien). Formée par les Soeurs de Saint Joseph de Cluny, formatrice elle-même, Présidente de l'Association pour la promotion de la broderie, Suzanne Maillot fut médaillée d'argent en 1986, d'or en 1994 au concours du Meilleur ouvrier de France avec une surnappe ayant demandé 896 heures de travail acharné. Elle connaît l'intérêt des touristes, la renommée internationale et la satisfaction d'exercer un art noble, les efforts promotionnels de la Maison de la Broderie fondée en 1986.
Mais elle a connu également les décès de deux frères, les départs d'autres frères vers les villes côtières, la réussite d'une soeur détentrice du brevet et devenue institutrice, l'honneur de la famille disait sa mère. Aujourd'hui elle déplore de voir ce savoir-faire délaissé par les jeunes filles de Cilaos. Comme si une nouvelle et inéluctable transformation s'opérait en ce début de siècle! Comme si l'école, la ville, la vie moderne, la mobilité géographique en brisant un équilibre social, avaient brisé concomitamment l'activité familiale et villageoise que le Cirque avait suscitée.
Edmond Maestri
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Joseph, aîné d'une fratrie de 4 enfants, naquit le 30 avril 1930 aux Avirons. Dans cette famille pieuse comportant un chanoine, le père était forgeron comme ses aïeux depuis presque deux siècles. Petit propriétaire terrien avec quelques colons, pratiquant également le petit élevage, il présida même le premier syndicat agricole de la ville.
Elevé strictement, dans le respect des règles de bonne conduite, Joseph eut aux Avirons une enfance heureuse partagée entre le sérieux de l'école et le plaisir du ruisseau avec les enfants de son âge Exilé au lycée Leconte de Lisle qu'il rejoignait en train, il apprit à apprivoiser la ville, à faire ses premières rencontres marquantes, le prince Vinh San ou Abd el-Krim, et devint bachelier (mention AB) en 1950. Il part alors pour la faculté des Sciences de Montpellier où il obtient un PCB (Physique, Chimie, Biologie), fait connaissance avec Marc Rivière et assiste à la Semaine sociale de Joseph Folliet, s'initiant ainsi à l'apostolat social dans la tradition de Marc Sangnier.
Admis en 1951 au Séminaire des vocations tardives de Toulouse où il apprend à admirer le cardinal Saliège, il intègre enfin le Séminaire colonial de Paris (1952-1954). Là il fréquente des étudiants réunionnais, crée un bulletin qui lui permet d'échanger avec Ary Leblond, rencontre Monseigneur Roncalli, participe enfin aux recherches sur la doctrine sociale de l'Eglise, traversée par les questions du capitalisme, du socialisme et du colonialisme. C'est alors qu'il décide d'accorder une fois pour toutes, sa vie, sa foi, ses principes, et ses actes.
De retour à La Réunion, il devient professeur...de Lettres et d'Anglais dans l'enseignement public, se marie en 1955, entre au SNI qu'il juge vite trop politisé et surtout trop divisé par l'obsédante question du statut. Il intègre enfin le Grand Orient de France en 1957.
Désormais structuré et déterminé dans ses idéaux humanistes, pour lui à la fois chrétiens et francs-maçons, il n'a de cesse de batailler pour écarter une autonomie jugée floue à laquelle le «peuple» n'est pas préparé, tout en luttant pour une société plus juste sans rupture avec la France. Ni dans le PCR, ni dans le PSR, ni dans le PSIR, ni socialiste départementaliste intransigeant, il paraît isolé et ne récolte qu'insultes et sarcasmes (comme pour l'élection cantonale des Avirons en 1967), malgré une campagne qu'il avait imaginée efficace puisque propre. Il parvient au moins en 1974, en tant que mandataire de F. Mitterrand, à constituer pour la présidentielle une unité conjoncturelle de la Gauche, hélas sans lendemain. Ses origines, l'éclectisme de son parcours, sa soif consensuelle d'humanisme, provoquent en effet plus de rejet que d'adhésion!
Mais J.Mondon reste fidèle à ses engagements. Il souhaite l'alliance «gaullienne» du Capital et du Travail, désire aujourd'hui comme hier une évolution maîtrisée du statut, souhaite plus que jamais l'apparition de tuteurs politiques honnêtes, ouverts, lucides sur les «réalités» insulaires afin d'aider les Réunionnais à sortir de la misère, du chômage, du consumérisme, de la dépendance, notamment alimentaire. Depuis une douzaine d'années il diffuse à travers l'ADELROI du sociologue Vandewynckele, l'idée d'une démocratie de la «transfrontalité» dans l'océan Indien.
Sur un ton mesuré, conciliant, allusif ou elliptique, pour ne blesser personne et ne pas polémiquer, les confidences de J.Mondon incarnent davantage la sagesse idéalisée qui l'a toujours guidé qu'une cohérence politique mobilisatrice qu'il a toujours désirée.
Plus qu'un autre peut-être J. Mondon révèle et souligne par ses origines, sa vie, ses idées et ses actions parfois avortées, les écartèlements destructeurs qui affaiblissent La Réunion.
Edmond Maestri
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Le peuplement de Bourbon ; La Réunion des origines au début du XXe siècle
Patrick Nurbel
- Arcc
- 15 Mars 2012
- 3760183302182
L'île Bourbon, inhabitée jusqu'au milieu du XVIIè siècle, se peuple progressivement d'apports européens, africains, malgaches et indiens. L'immigration libre venue essentiellement d'Europe et partiellement d'Asie se double d'une immigration forcée, arrivant principalement de Madagascar et d'Afrique de l'Est. Le développement de la culture caféière à partir de 1715, et des cultures vivrières, entraîne un accroissement de la main-d'oeuvre servile et un afflux de colons européens. Le Code noir de 1723 régit les rapports entre les maîtres et les esclaves. Une des réponses à la brutalité du système servile réside dans le marronnage, parfois dans la révolte.
Dès les origines du peuplement, le métissage est une réalité et un des traits caractéristiques de la jeune colonie. Les affranchis (Libres de couleur), disposant, théoriquement, des mêmes droits que les Blancs, forment une catégorie particulière au sein de la société. Après l'épisode de l'occupation anglaise (1810-1815), la traite négrière tend à se tarir, et est effectivement interdite à partir de 1830. À l'issue de l'abolition de l'esclavage en 1848, les possédants réunionnais se tournent vers une politique de recrutement tous azimuts, d'autant que les plantations de cannes à sucre se développent. C'est la période de l'engagisme. Si divers sites sont sollicités, dans des conditions qui rappellent bien souvent l'esclavage, c'est essentiellement l'Inde, très peuplée, soumise à de nombreuses famines, qui devient la principale pourvoyeuse de travailleurs engagés. Bien souvent, ils s'établissent définitivement, font souche dans la colonie, et impriment une marque certaine dans la société. La Réunion est aussi concernée par la diaspora asiatique qui se manifeste sur tout le pourtour du Pacifique et de l'océan Indien à la fin du XIXè et au début du XXè siècles. Elle reçoit l'apport (en contingents restreints) de Chinois majoritairement issus de la région de Canton, et d'Indiens musulmans provenant de la région du Gujerat (les « Z'Arabes »).
La physionomie de la population de La Réunion telle qu'on la connaît de nos jours se trouve à cette époque dessinée.
Abert Jauze est Docteur en Histoire et Chargé de cours à l'Université de La Réunion
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Alex Maillot né en 1952, est le second enfant de Jean-Baptiste né en 1888 à Grand Ilet, et d'Andrée Léone Hoarau, sa seconde femme née en 1911, épousée en 1947.
Alex naquit dans la Grande Ile par la volonté de son père de fuir en 1950 Sainte-Marie qui lui avait certes apporté la réussite sociale (petite propriété et petit commerce) mais semblait lui refuser, dans une sorte de « malédiction », la descendance souhaitée (Andrée Léone ayant eu deux enfants morts en très bas âge).
Les parents d'Alex passèrent donc du colonat de La Réunion à la colonisation, vers Morondava, bientôt à la tête de deux garçons, d'un beau domaine et d'une centaine de bovins.
Jusqu'au décès de son père en 1958, Alex vécut une enfance heureuse qui fit de lui un « Etranger » parlant uniquement le malgache, lors du retour de la famille à Sainte-Suzanne. A partir de1959, l'école marronne, l'école publique, le collège, la paroisse où il fut enfant de choeur, la Maison des Jeunes et de la Culture lui permirent de faire l'apprentissage d'une vie créole digne, studieuse mais pauvre.
Après un court passage (par manque de moyens) au séminaire de Cilaos entre 1962 et 1964, le jeune Alex repart à Madagascar de 1969 à 1972, à la rencontre des Réunionnais « expatriés ».comme à la recherche d'un eldorado perdu!
Lors d'un bref séjour au Guillaume en 1972-1973, il fait la découverte d'une autre Réunion, plus éprise de liberté, moins assujettie au prêtre dit-il, que l'Est encore ancré dans la société de plantations, avant de partir pour son service militaire sur le « Duquesne ». En 1973 et 1974 il entre alors en contact avec des intellectuels ou de riches héritiers métropolitains, marins comme lui, apprend à connaître la culture provençale mais aussi Freud et les philosophes. Il parcourt surtout l'Afrique, le Proche et le Moyen Orient, et la zone india-océanique.
C'est par conséquent un homme autre, ouvert au monde, qui réalise enfin en 1975 son désir d'entrer au séminaire. de Marseille.
Prêtre en 1981, dévoué à la population du Chaudron à laquelle il rappelle ses droits, cet adepte de la théologie sud-américaine de la Libération, apprend comme dans un aboutissement personnel, la culture du « fénoir ».
Rejeté par sa hiérarchie c'est aujourd'hui en « laïc » qui n'a rien renié de ses convictions, qu'il continue son « travail social ».
Par une série de ruptures qui font de sa vie un passage à gué, Alex est un acteur de la fulgurante évolution de La Réunion depuis la départementalisation.
Il incarne également cette « Créolie » intégratrice de ses « différentes histoires » et représente flatteusement ces Réunionnais qui dans le divin ou hors du divin, ont su échapper à l'utilitarisme et donner un sens à leur vie.
Edmond Maestri.
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A travers sa tumultueuse existence, Emmeline PAYET, née par hasard à Marseille en 1935, évoque non seulement une fascinante saga familiale mais l'histoire d'une île façonnée par le sucre, tiraillée entre l'eldorado malgache et le tropisme métropolitain.
L'aventure débute à la fin du XIXe siècle quand Yvrin PAYET son grand-père, garçon de cour, fait petite fortune à Madagascar pour être en mesure d'épouser la fille de son patron. Il s'ensuit une belle ascension qui conduit le patriarche à la tête du domaine de « BEL AIR ».
C'est là qu'Emmeline apprend son île et les humanités, le catéchisme et la vie, les réalités économiques et la spiritualité de lieux métissés, l'existence de gens aisés dont elle fait partie, et de pauvres « de couleur » qu'elle n'hésite pas à fréquenter, elle la fille d'Edmond PAYET et d'une mère française catholique et monarchiste. C'est l'âge d'or, dominé par la sévérité de grands-parents et de parents cultivés, la fructueuse mais cruelle (pour les pauvres) éducation religieuse, l'éveil des sens et la structuration d'une personnalité rebelle, sensible à l'injustice.
Lorsqu'en 1951, son père rejeté de « BEL AIR » par sa propre famille, préfère l'exil en Métropole, une douloureuse expérience commence pour la jeune Réunionnaise. Ballottée entre le métier d'infirmière et celui d'enseignante, elle erre entre la Côte varoise où ses parents se sont installés, le Maroc et Israël, connaît une relative misère, la vraie dépression, les déceptions sentimentales, sans cesser de s'intéresser au monde.
C'est peut-être cette incessante ouverture aux autres et à la vie qui, de retour à La Réunion avec ses 3 enfants, lui fait tant aimer les parfums de son île, ses habitants, ses jeunes, et tous ceux qui, par la musique, la littérature ou le théâtre, savent se dépasser.
Avec la force d'une croyante, la révolte indignée d'une « juste », Emmeline semble avoir traversé sa vie avec lucidité, courage, et une apparente et troublante innocence.
Revenue dans son espace d'expérience, elle a « bricolé » une identité bien personnelle qui rassemble les charmes mystérieux de l'insularité et les voies parfois chaotiques du développement réunionnais.
Edmond Maestri
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Michel Chung-Poo-Lun est né à Saint-Louis en 1939 de parents venus de Chine et arrivés à La Réunion une dizaine d'années auparavant. Il est le 1er fils mais 5ème enfant d'une fratrie de 10. Il rapporte ici le départ de Canton de son père, choisi parce qu'il était en bonne santé et « savait compter », gage absolu d'une réussite qui ne pouvait aboutir que dans le commerce, l'accueil de sa mère dans la famille de la soeur de son père, la barrière terrible de la langue, la défiance des autorités.
Michel témoigne aussi d'une farouche volonté familiale d'intégration : acceptation des règles et des symboles nationaux du pays d'accueil, glorification de l'Ecole, et parfois naturalisation, francisation des noms, conversion au catholicisme.
Sans pour autant que ne soit oubliée la culture structurante d'origine à travers les rites funéraires, la solidarité, le maintien des liens avec la Chine, un syncrétisme religieux de fait, l'inculcation du respect. Respect et fierté du pays d'origine comme du pays d'accueil, de la famille, des aînés, de la valeur « travail ». C'est l'histoire d'une identité duale, en perpétuelle construction par la mise en cohérence de deux civilisations.
La description du monde de la boutique et de l'arrière-boutique constitue un extraordinaire document ethnographique : quotidien étriqué, pratiques commerciales astucieuses (carnet de crédit, récupération systématique, petites fraudes, gestion des stocks) avant l'inéluctable évolution vers la « superette », ou la société de commerce, autres formes d'adaptation culturelle !
Mais quand ce fils d'immigrés collectionne tous les objets usuels qui ont jalonné sa vie et raconte avec émotion ses rencontres avec des « personnalités », il se livre non seulement à une intéressante oeuvre patrimoniale et mémorielle, mais surtout à l'appropriation de son histoire dans le cadre réunionnais et à l'acceptation heureuse de son destin métissé.
Edmond Maestri
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Le nouvel âge de la mobilité des Départements et Régions d’Outre-Mer ; de la discrimination à l’insertion ?
Patrick Nurbel
- Arcc
- 6 Novembre 2013
- 3760183302168
L'époque du BUMIDOM est bien lointaine. La mobilité des Départements et Régions d'Outre-mer parait, aujourd'hui, moins un impératif qu'une nécessité. Les dromiens, à l'exception des fonctionnaires nouvellement recrutés, ne se vivent plus comme des « ex-ilés », comme des victimes d'une diaspora. A la figure du dromien misérable, isolé et passif de la postcolonisation semble s'opposer depuis une dizaine d'années celle d'un migrant stratège qui est acteur de sa mobilité. A l'opposé de ce modèle, on trouve cependant une part non négligeable de jeunes dromiens sans diplôme et sans qualification qui refusent la mobilité et vivotent au RSA plutôt que de migrer pour un emploi.
Ce constat appelle une série de questions auxquelles le colloque souhaite répondre : la mobilité est-elle aujourd'hui uniquement liée à un choix individuel, volontaire et rationnel des jeunes dromiens et/ou répond-elle à des logiques institutionnelles et vécues comme une contrainte au départ ? La massification de la scolarité des dromiens, leurs diplômes et les dispositifs d'aide à la mobilité ont-ils annihilé toute discrimination à l'emploi ? L'égalité des chances concerne-t-elle également les dromiens ?
Loin de tout jugement moral et de tentations légitimistes ou misérabilistes, ce colloque interroge « le nouvel âge de la mobilité » et leurs frontières dans les DROMS de l'Océan Indien comme ceux des Caraïbes, de Guyane et de Polynésie. Une comparaison avec d'autres espaces et d'autres modèles de mobilité (Amérique du Sud, Maghreb) prend la mesure de la spécificité des DROMS et de la France au sein de la mondialisation.
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Sur les 5000 langues aujourd'hui utilisées dans le monde, 2500 sont menacées de disparition plus ou moins rapide. Claude Hagège, auteur de Halte à la mort des langues, estime qu'une langue meurt tous les quinze jours. Au cours de ce siècle 90% des langues existantes auront probablement disparu.
Et pourtant les Réunionnais pensent que leur langue première n'est pas menacée. Si cela est vrai, quels sont les atouts dont dispose notre créole ? Si cela ne l'est pas, quelles sont ses faiblesses ? Si le créole réunionnais devait disparaître, quels pourraient être le processus de sa disparition ? Que pourrait-on faire pour enrayer ce processus ? Que fait-on aujourd'hui pour assurer la vie de notre créole ?
Dessi le 5000 lang demoun i ansèrve dessi La Tèr, néna 2500 lé kapab mor, si pa jordi sar demin. Claude Hagège - li la-ékrir « Halte à la mort des langues» - i estime inn lang i mor tou lé kinz jour. Dann lo sièk i vien, 90 pou 100 bann lang çak i koz koméla, sar fine mor.
Malgré, bann Rényoné i majine la poin rien i menasse la lang zot papa-manman.
Si ça lé vré, ékel zatou nout kréol néna ? Si lé pa vré, lékèl son poin fèb ? Si in jour lo kréol La Rényon i mor, par koman ça v'arivé ? Kosa i fodré fé po anbar lo prossessis son disparission
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Concurrence missionnaire et compétition franco-britannique dans l’Océan Indien entre 1815 et 1914
Patrick Nurbel
- Arcc
- 15 Mars 2011
- 3760183301871
La fin des guerres napoléoniennes consacre la suprématie navale et commerciale de la Grande-Bretagne. Maîtresse des Indes, elle contrôle désormais toutes les routes qui mènent dans l'Océan Indien vers les ports de Bombay, Madras ou Calcutta. La conquête de l'île de France et des Seychelles symbolisent le nouvel ordre maritime dans lequel la France est réduite à jouer le second rôle. La colonisation de Madagascar (1896) ne bouleverse pas un rapport de forces qui a tourné au profit de l'empire britannique. La diplomatie française ne conserve guère dans son jeu que la carte religieuse. Elle compte sur le catholicisme, dont elle se déclare le protecteur, pour conserver une influence dans les régions où celui-ci est bien implanté (Mascareignes). Elle considère aussi que le nouveau dynamisme des missions catholiques, dominées par les Français, est l'occasion d'ouvrir des écoles où des élites locales apprendront le français et l'amour de la France. La conversion au catholicisme passe ainsi à Madagascar comme l'expression de l'adhésion à la France alors que le protestantisme est soupçonné de favoriser les intérêts britanniques. Le recours à l'arme culturelle en dehors des colonies françaises devient encore plus manifeste avec la fondation de l'Alliance française en 1883 qui se dote de Comités locaux (Port-Louis). L'Annuaire des oeuvres françaises à l'étranger n'hésite pas à annexer missionnaires et écoles catholiques. L'Entente cordiale et la Première guerre mondiale consolident la division des tâches. Elle donne à la Grande-Bretagne la domination de l'Océan Indien et laisse à la France le contrôle direct de quelques territoires, de Djibouti à Pondichéry, en passant par Madagascar et La Réunion, et la possibilité de diffuser sa culture et sa langue, notamment à Maurice.
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Dans cet entretien avec le professeur Eve, Paul Hoarau, qui fut attaché parlementaire de W.Bertile et Conseiller régional, évoque sa vie, ses luttes, ses convictions et ses espoirs pour La Réunion.
Il porte sur le second XXe siècle qu'il a marqué de son empreinte en tant que directeur du journal « Le Progrès », membre du « Comité du progrès », et inlassable combattant contre la fraude électorale, un regard lucide, distancé, indépendant et passionné.
Dans une vision sans complaisance, soutenue par sa foi chrétienne, son expérience journalistique et politique, sa sagesse mesurée, il fustige la paresse intellectuelle, l'excessif tropisme métropolitain, le manque d'imagination ou à l'inverse, la mégalomanie, des acteurs réunionnais, notamment politiques.
Témoin en 1946 d'une départementalisation qui donna à ses concitoyens un siècle après la liberté de 1848, les moyens d'exercer cette liberté, il fut un des artisans de la régionalisation de 1982 qui accorda au peuple la responsabilité de la démocratie dans l'Ile.
A l'aube du XXIe siècle, cet humaniste place ses espoirs dans un « corps électoral » qui dépasserait les luttes partisanes, dans une sorte de « déshinibition » des esprits, dans la coopération avec les îles du Sud-Ouest de l'océan Indien.
C'est, selon P.Hoarau, dans ce triple attachement à La Réunion, à la France, à l'indiaocéanité, que se forgera le mieux « l'identité réunionnaise ».
Edmond Maestri
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Aliamentation, pratiques culinaires et rites de repas dans les pays du sud-ouest de l’océan Indien - (XVIIe à nos jours)
Patrick Nurbel
- Arcc
- 6 Novembre 2013
- 3760183302427
La culture alimentaire c'est-à-dire l'ensemble des valeurs et des pratiques liées à l'alimentation et partagées par une large partie d'une population, change grâce à l'essor de la circulation des produits et des modes, aux progrès de l'agriculture, aux nouveaux besoins de la consommation.
Les cuisines de l'océan Indien sont des lieux de mémoire par excellence. Elles sont en constante évolution. Elles existent et évoluent au gré de la diffusion des plantes aromatiques et culinaires. Elles empruntent à celles des puissances coloniales dominatrices et à celles de tous les pays qui ont participé à leur peuplement au fil des décennies. Leurs marmites sont des lieux de rencontre des fourneaux occidentaux et des fourneaux de l'Orient. Les marmites des élites dominantes ne sont pas celles des dominés, mais les premières bouillent grâce aux doigts des seconds qui acquièrent ainsi des nouveaux savoir-faire qu'ils ne peuvent manquer tôt ou tard de transmettre dans leur monde. Les cuisines sont de fait, des espaces de sauvegarde identitaire, mais aussi d'ouverture, de combinaisons, de créations, de créolisation. Quelle est la part des influences occidentale et orientale ? La prise en compte des apports des différentes aires culturelles devrait permettre de nuancer les réponses, de découvrir les singularités. Ces cuisines ont-elles connu des temps d'immobilisme et des temps d'accélération ? Les temps de colonisations (hollandaise, française ou anglaise) sont-ils aussi porteurs que les temps de décolonisations ? Parler de la culture de table, c'est aussi poser la question de la souveraineté alimentaire. Ces cuisines dans leur réalisation doivent-elles être dépendantes des produits importés ou des potagers individuels ? Comment les populations ont-elles négocié pour que ces cuisines ne soient pas dépensières ? Les préparations culinaires doivent être consommées. Avant de passer à la table, les sociétés prises en référence ne l'utilisaient pas forcément. Cet aspect ne peut être négligé, tout comme l'art de la table et les industries qui gravitent autour de lui.
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Pour marquer le 31ème anniversaire du décès de Malcolm de Chazal, la Fondation Malcolm de Chazal, créée par l'état mauricien, organise une Année Malcolm de Chazal pendant laquelle conférences, animations en milieu scolaire, expositions, festival de théâtre, colloque international pluridiscipinaire, publications diverses tenteront de faire mieux connaître et apprécier cet artiste intégral mauricien.
S'il fût tour à tour essayiste, aphoriste, dramaturge, poète, chroniqueur, conteur, peintre, Malcolm de Chazal s'est toujours défendu d'être associé à une forme d'art spécifique et c'est bien pour cela qu'il n'a eu de cesse de multiplier le recours à des media d'expression différents, des media différents dans la forme mais éclairant le même fond. Son oeuvre reste, de plus, à découvrir car, jusqu'à ce jour, les critiques n'ont travaillé que sur les ouvrages disponibles dans les grandes bibliothèques européeennes et nord-américaines, soit une petite vingtaine au grand maximum. L'essentiel de son oeuvre, soit plus de trente-cinq ouvrages d'épaisseur variée, reste à être diffusé pour étude car ces petits tirages de 100 exemplaires n'ont guère quitté l'île Maurice. Souhaitons que le projet de la Fondation de numériser l'oeuvre de cet écrivain qualifié un jour de génie puisse être concrétisé!
Malcolm de Chazal est mort, certes, mais n'écrivait-il pas: « La mort, pour moi, c'est passer à un autre état de temps d'abord, puis d'effacer le temps. Mon sens d'éternité, qui est la poésie en soi, est l'abolition d'espace qui sépare les êtres, mon ciel n'est qu'amour, où je me veux tout comme dans Sens-Plastique, où l'univers est moi et je suis univers... » Et lorsqu'en 1954 disparaissait son grand ami en poésie Robert Edward-Hart, celui qui lui avait fait découvrir le mythe de la Lémurie sur lequel il allait asseoir une grande partie de sa métaphysique. Malcolm de Chazal écrit dans Advance un article intitulé Le poète ne meurt pas :
« Jamais le poète n'est plus vivant que quand il est mort. (.) Son immortalité, c'est le souffle de l'Esprit qui l'inspira, avant qu'il l'aspira vers les contrées d'où il n'y a pas de retour, car le poète, dans l'enfer d'ici-bas, est un extradé. (.) Quand on m'a annoncé la mort de Hart, ma première pensée a été : que voit-il ? Car le poète voit. » C'est donc celui qui a vu et qui voit toujours que la Fondation veut honorer par cette Année Malcolm de Chazal.