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Mercure De France
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Signé Ajar, ce roman reçut le prix Goncourt en 1975. Histoire d'amour d'un petit garçon arabe pour une très vieille femme juive : Momo se débat contre les six étages que Madame Rosa ne veut plus monter et contre la vie parce que «ça ne pardonne pas» et parce qu'il n'est «pas nécessaire d'avoir des raisons pour avoir peur». Le petit garçon l'aidera à se cacher dans son «trou juif», elle n'ira pas mourir à l'hôpital et pourra ainsi bénéficier du droit sacré «des peuples à disposer d'eux-mêmes» qui n'est pas respecté par l'Ordre des médecins. Il lui tiendra compagnie jusqu'à ce qu'elle meure et même au-delà de la mort.
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Lorsqu'on a besoin d'étreinte pour être comblé dans ses lacunes, autour des épaules surtout, et dans le creux des reins, et que vous prenez trop conscience des deux bras qui vous manquent, un python de deux mètres vingt fait merveille. Gros-Câlin est capable de m'étreindre ainsi pendant des heures et des heures. Gros-Câlin paraît au Mercure de France en 1974. Il met en scène un employé de bureau qui, à défaut de trouver l'amour chez ses contemporains, s'éprend d'un python. L'auteur de ce premier roman, fable émouvante sur la solitude de l'homme moderne, est un certain Emile Ajar. La version publiée à l'époque ne correspond pas tout à fait au projet initial de son auteur qui avait en effet accepté d'en modifier la fin. On apprendra plus tard que derrière Emile Ajar se cache le célèbre Romain Gary. Dans son ouvrage posthume, Vie et mort d'Emile Ajar, il explique l'importance que revêt, à ses yeux et au regard de son oeuvre, la fin initiale de Gros-Câlin. Il suggère qu'elle puisse un jour être publiée séparément... Réalisant le souhait de l'auteur, cette nouvelle édition qui paraît aujourd'hui reprend le roman Gros-Câlin dans la version de 1974, et donne en supplément toute la fin " écologique ", retranscrite à partir du manuscrit original.
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« Je vous préviens que ça ne se passera pas comme ça. Il est exact que je viens d'avoir quatre-vingt-cinq ans. Mais de là à me croire nul et non avenu, il y a un pas que je ne vous permets pas de franchir. Il y a une chose que je tiens à vous dire. Je tiens à vous dire, mes jeunes amis, que je n'ai pas échappé aux nazis pendant quatre ans, à la Gestapo, à la déportation, aux rafles pour le Vél'd'Hiv', aux chambres à gaz et à l'extermination pour me laisser faire par une quelconque mort dite naturelle de troisième ordre, sous de miteux prétextes physiologiques. Les meilleurs ne sont pas parvenus à m'avoir, alors vous pensez qu'on ne m'aura pas par la routine. Je n'ai pas échappé à l'holocauste pour rien, mes petits amis. J'ai l'intention de vivre vieux, qu'on se le tienne pour dit ! »
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« Après avoir signé plusieurs centaines de fois, si bien que la moquette de ma piaule était recouverte de feuilles blanches avec mon pseudo qui rampait partout, je fus pris d'une peur atroce : la signature devenait de plus en plus ferme, de plus en plus elle-même, pareille, identique, telle quelle, de plus en plus fixe. Il était là. Quelqu'un, une identité, un piège à vie, une présence d'absence, une infirmité, une difformité, une mutilation, qui prenait possession, qui devenait moi. Émile Ajar.
Je m'étais incarné. » Romain Gary.
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